18 février 2006

ASM: Alerte rouge!

26 mai 2004 : l’AS Monaco vient de vivre ses dernières heures de gloire… Sans le savoir, le club de la Principauté allait, lentement mais sûrement, brûler à petits feux. Qui aurait pu imaginer, pourtant, qu’à l’issue de cette extraordinaire saison, le club imploserait au point de repartir de zéro ? Pas grand monde, à vrai dire, car cette équipe si séduisante et généreuse ne demandait qu’à rebondir, afin que perdure cette flamme de folie qui a tant fait battre le cœur rouge et blanc des plus fervents supporters de l’AS Monaco…
Au soir de sa défaite en finale de la Ligue des champions face à Porto, c’est comme si la Terre toute entière s’écroulait sur nous tous, supporters de l’AS Monaco. Le parcours européen nous avait rendu fiers de cette équipe au cœur vaillant et qui nous avait fait vivre des moments intenses tout au long de la compétition. Au-delà des désormais cultissimes victoires face à l’ogre madrilène et à la redoutable formation de Chelsea, c’est la naissance d’un groupe qui fit émerger cet exploit sportif hors du commun. Je me souviens en particulier de ce pacte que s’étaient tenus de respecter tous les membres de l’effectif victorieux de la Coupe de la Ligue 2003, à l’exception du Mexicain Rafael Marquez, parti vers d’autres cieux. Du reste, ce fût – à ma connaissance – le seul et unique départ de ce mercato pourtant mouvementé du côté des coulisses, et pour cause, puisque le club avait rendez-vous avec la Direction Nationale de Contrôle de Gestion afin de remettre ses comptes à niveau. Un déficit qui faisait craindre le pire puisque le club était purement et simplement menacé de rétrogradation en Ligue 2. Une situation inacceptable pour un club dont le prestige n’a jamais été contesté au sein d’un championnat de France qui ne pourrait s’en priver.
Le sauvetage administratif ravivait pourtant la flamme de l’espoir au sein d’un club plus que jamais taillé pour réussir. Emmené par un Shabani Nonda qui connaissait alors une période de très haut niveau au point de faire partie des plus grands attaquants du championnat, il ne faisait guère de doute que l’équipe accomplirait une saison pleine et que l’attaquant congolais finirait de nouveau parmi les meilleurs buteurs à l’issue de la saison. Malheureusement, le destin est parfois cruel et une grave blessure allait le tenir éloigné des terrains pour le restant de la saison. C’en était trop pour Didier Deschamps, dont les ambitions nourries par ses nombreux titres glanés en tant que joueur, étaient quelque peu contrariées. Et c’est d’un véritable coup de génie qu’il orchestra le retour au premier plan du club de la Principauté en faisant signer un grand attaquant, en la personne de Fernando Morientes. Une signature qui n’allait en rien altérer l’incroyable solidarité qui s’était formée durant l’intersaison. Un signe fort des joueurs, qui se concrétisa d’ailleurs rapidement au niveau des résultats puisque l’ASM caracolait en tête du championnat de France à l’issue des matches allers. Beaucoup s’imaginaient même que le titre était joué, au soir d’une rencontre opposant les deux plus grands rivaux de ces quatre dernières années. Un sentiment renforcé par la déculottée infligée par les Rouges et Blancs en Coupe de France face à leurs homologues rhodaniens. Un triplé de Fernando Morientes parachevait une victoire sans appel de 4 buts à 1 qui sonna définitivement les rêves de gloire du club alors entraîné par Paul Le Guen. Même le Président Aulas, éternel optimiste, ne pouvait cacher ce sentiment que l’AS Monaco était en train de frapper un grand coup sur une saison menée de mains de maître…
Mais c’était sans compter sur les aléas de ce sport si particulier, fait de joies et de peines, et qui valorise bien souvent les performances sportives au détriment de la qualité humaine d’un groupe. Une deuxième partie de saison calamiteuse en championnat était d’ailleurs masquée par le formidable parcours en Ligue des champions, ponctué par une qualification invraisemblable pour la finale. Tel un symbole, je me suis soudain demandé quelque chose de profondément insensé en ce moment si crucial : faut-il que l’équipe gagne cette finale pour que tous les joueurs qui la composent ne quitte pas le navire en fin de saison, comme ce fût le cas un an auparavant ? Probablement non, car dans ce monde où la loi du plus fort est toujours la meilleure, il ne faisait aucun doute que les joueurs qui ont fait hier de Monaco ce qu’il est devenu seraient demain à Milan, Barcelone, Madrid ou encore Manchester. Le destin est si cruel… Mais comment peut-on imaginer se faire le sacrifice d’une finale pour espérer voir ses nouvelles idoles à nouveau enfiler ce maillot rouge et blanc qui m’a tant fait vibrer en cette saison 2003/2004 ? C’est insensé bien sûr ! Et d’ailleurs, il ne me faut pas plus d’une minute pour effacer cette idée absurde de ma tête. Une finale, ça ne se joue pas, ça se gagne ! C’est bien connu. Mais le destin n’a pas été tendre avec l’ASM, lourdement battue par Porto à Gelsenkirchen pour ce qui aurait pu constituer une consécration méritée…
Dans ces conditions, la page était, semble-t-il, trop difficile à tourner et c’est bien malencontreusement qu’après cette période faste, le club entama un lent processus de décadence. L’intronisation de Michel Pastor, une des plus grosses fortunes d’Europe, semblait pourtant redonner ce nouvel élan dont l’ASM avait besoin. Du moins, c’était le souhait des inconditionnels de l’ASM, si heureux de voir enfin une équipe digne de son standing. Malheureusement, la passation de pouvoir ne fut pas à la hauteur des espérances et le départ programmé de Dado Prso allait, bien malgré lui, déclencher une cascade de départs aussi imprévisibles que préjudiciables. « On ne résiste pas à l’appel du cœur. » C’est ce qu’a dû se dire Jérôme Rothen au moment de rejoindre le club de la capitale, après deux ans et demi de bons et loyaux services. Mais que dire du surprenant départ de Ludovic Giuly, un joueur au talent exceptionnel et à l’état d’esprit phénoménal ? Car c’est bien là que les dirigeants ont failli dans leur mission de permettre au club de repartir de plus belle après ce glorieux épisode. Son charisme manqua tant à l’ASM que le club connu un sérieux coup d’arrêt qui s’avéra même fatal après l’échec retentissant de ne pas conserver sa perle espagnole. Et si l’alléchante proposition transmise par les émissaires barcelonais était quasiment irrefusable, quoi de plus regrettable que de laisser filer un joueur au talent si extraordinaire que Fernando Morientes ? Ma modeste expérience de supporter me suffirait probablement à dire que l’ancien Madrilène a tellement marqué sa seule et unique saison disputée sous le maillot rouge et blanc par sa classe et son génie qu’il pourrait parfaitement figurer parmi les légendes du club. Alors comment peut-on laisser partir son capitaine, symbole de l’épopée européenne, ainsi que l’un des plus grands attaquants que le club ait connus, avec autant de laxisme et de désinvolture ? Des contraintes économiques ? Tout à fait insensé lorsque l’on prend en compte la cagnotte récoltée par le club, en récompense de son formidable parcours européen. D’autant que le départ de Ludovic Giuly ne dépendait que d’un effort financier loin d’être insurmontable…
Les arrivées successives de stars plus ou moins confirmées comme Javier Saviola, Mohammed Kallon, Javier Chevanton ou encore Douglas Maicon, si séduisantes fussent-elles, ne compensaient d’ailleurs pas le trou béant laissé par les héros de l’aventure européenne des Rouges et Blancs, et ce, en dépit de l’honorable troisième place acquise au terme de la saison 2004/2005. Pas de quoi faire la fine bouche lorsque l’on connaît la difficulté à confirmer dans un sport particulièrement impitoyable vis-à-vis des clubs en réussite sportive. L’intersaison 2005 donnait néanmoins le ton d’un renouveau espéré. D’autant que Didier Deschamps avait tenu à prolonger son bail qui le liait à l’ASM, afin de finir ce qu’il était venu accomplir. Mais après un départ canon sur le marché estival (Olivier Sorlin, Toifilou Maoulida, Guillaume Warmuz, Lopez Gerard, Olivier Kapo, et surtout Camel Meriem), "l’attaquant de classe internationale" tant convoité ne vint désespérément pas conclure un recrutement digne de ce nom. Un échec qui introduisit un certain malaise dans le groupe, accentué par l’attitude désinvolte d’Emmanuel Adebayor à l’aube d’une saison pourtant riche en promesses. La rébellion des cadres initiée par Patrice Evra, Lucas Bernardi, Gaël Givet et Flavio Roma avait pour but de sonner la révolte d’une équipe meurtrie dans sa chair, et le groupe se trouva finalement scindé en deux entre, d’un côté, les derniers "rescapés" de l’épopée européenne et, de l’autre, les recrues estivales censées donner un souffle nouveau et permettre au club d’être suffisamment armé pour la Ligue des champions. Malheureusement, l’élimination inattendue face au Bétis Séville et le parcours chaotique en championnat donnaient les prémices d’un clash inévitable à la tête de l’équipe, surtout après les déclarations fracassantes de Didier Deschamps sur le standing du club et le recrutement avorté du fameux "attaquant de classe internationale". Et malgré cette sortie houleuse au terme de la défaite face à Rennes qui fut fatale à l’ancien capitaine des Bleus, peu sont ceux qui se réjouissent de sa démission à l’heure où les ambitions du club ont été considérablement revues à la baisse. Son charisme et sa soif de victoires ont hissé le club au sommet du football européen. Mais comme tout sommet implique une décente vertigineuse, il était finalement écrit que son sort allait être scellé un jour ou l’autre. Orphelin de ses fers de lance à l’issue de l’intersaison 2004, il tenta tant bien que mal de garder le cap pour accomplir sa tâche et mener à bien son ambitieux projet. On ne peut que lui rendre hommage, tant son implication au sein du club aura insufflé une dynamique de résultats sportifs plus qu’honorables.
Ce départ sonnait véritablement comme la fin d’un règne. Et lorsque l’on connaît l’exigence du haut niveau, on peut difficilement tolérer de voir tout un travail être détruit de la sorte par des personnes supposées compétentes, sous prétexte que le club connaît certaines difficultés financières. Surtout lorsque ces mêmes personnes laissent partir aussi facilement des joueurs qui ont fait la gloire du club (Ludovic Giuly, Dado Prso, Jérôme Rothen, Shabani Nonda, Julien Rodriguez et Patrice Evra, pour ne citer qu’eux), sans oublier l’échec retentissant du vrai-faux transfert de Fernando Morientes, un joueur élevé au rang de mythe parmi les supporters rouges et blancs et dont la volonté première était de rester sur le Rocher… C’est pour toutes ces raisons que les Rouges et Blancs semblent aujourd’hui dans l’impasse, à l’heure où les cadres peuvent légitimement envisager de quitter un navire plus que jamais en décadence…

02 février 2006

ASM: Les temps sont durs!...

Dans des conditions climatiques à la limite de l’injouable, l’AS Monaco a été piteusement éliminée par la formation amateur de Colmar lors des 16ème de finale de la Coupe de France. Trois jours après la décision de reporter le match qui devait les opposer à l’Olympique Lyonnais dans le soin de préserver la protection des principaux acteurs, les joueurs du Rocher pouvaient crier leur colère à l’issue d’une rencontre où les Alsaciens n’ont pourtant pas déméritée…
L’année 2006 pouvaient difficilement commencer plus mal pour les Rouges et Blancs, puisque l’équipe de la Principauté enregistre le bilan catastrophique de trois défaites, pour deux victoires et deux matches nuls, toutes compétitions confondues. Sans compter le chambardement total de l’effectif, qui a vu pas moins de neuf joueurs se croiser durant le mois de janvier. La période hivernale du mercato à peine commencée, Marco Di Vaio était la première recrue monégasque de Francesco Guidolin. Un renfort de poids lorsque l’on connaît le "pedigree" de l’attaquant italien. Mais la première partie de ce mercato était surtout marquée par les attitudes indésirables de Patrice Evra et Emmanuel Adebayor. Les deux joueurs, très affectés par le départ de Didier Deschamps, ont tenu à le faire savoir par des méthodes fortes, en ne participant pas aux entraînements à la reprise du groupe pro. Un départ du latéral gauche était d’autant plus inévitable que c’est Sir Alex Ferguson en personne qui lui fit les yeux doux. Dans ces conditions, difficile de tergiverser à quelques mois de la Coupe du monde, et le contrat de trois ans et demi, assorti d’une clause libératoire estimée aux alentours de 7 millions d’euros, était finalement parachevé après seulement quelques jours de transaction. Afin de palier ce départ, qui en appelait d’autres, la cellule de recrutement se mit rapidement sur le pied de guerre en frappant un grand coup sur le marché des transferts, avec la signature de Christian Vieri en provenance du Milan AC. Une signature prestigieuse pour un club en mal de considération, tant sur la scène nationale qu’internationale. Ajoutez à cela un accent italien de plus en plus marqué, qui n’était visiblement pas du goût d’Emmanuel Adebayor, parti à la CAN avec la sélection togolaise, et qui voyait ses chances de faire partie du onze type de Francesco Guidolin significativement amoindries. C’en était trop pour ce joueur au caractère bien trempé, qui décida de partir vers d’autres cieux, du côté d’Highbury…
L’ambiance morose du début d’année ne donnait pas pour autant de signes d’amélioration à la Turbie – loin s’en faut – et les résultats s’en ressentaient. Un piteux match nul face à la lanterne rouge du championnat en guise de présentation de l’équipe à la nouvelle recrue, suivie, quatre jours plus tard, d’une défaite lourde de conséquence face au concurrent girondin, qui mettait un terme brutal aux ambitions européennes de l’ASM. Le départ de Toifilou Maoulida, dans la discrétion la plus totale, était suivi du retour au bercail de Manuel Dos Santos, tandis que les victoires en Coupe face à Rhone-Vallée et Toulouse semblaient cacher de profondes lacunes dans le jeu, et ce n’est pas le match nul à Bollaert qui changeait la tendance. Pas de quoi donner le moral à une équipe renforcée par un joueur de National que l’on ne demande qu’à découvrir, mais abandonnée par un Olivier Sorlin apparemment lassé de se faire huer par le désormais exigeant public du Louis II. Sans compter les échecs successifs pour conclure l’arrivée de joueurs italiens particulièrement appréciés par le coach transalpin et le vrai-faux départ d’un autre joueur indésirable, en la personne d’Olivier Kapo. Toujours est-il que la mayonnaise semble avoir du mal à tourner en ce début d’année et que l’équipe va devoir trouver la bonne carburation dans une saison qui ressemble de plus en plus à une année noire…
L’élimination face à Colmar ne fait finalement que confirmer les problèmes sportifs et relationnels qui minent la vie du groupe, à l’image des états d’âme d’Olivier Kapo et de Douglas Maicon ou encore des petites frictions entre Francesco Guidolin et Camel Meriem. Toutes ces mésententes doivent être rapidement résolues, sous peine de finir la saison avec des conflits internes à répétitions qui ne manqueraient pas de déstabiliser les performances de l’équipe, surtout que plusieurs joueurs ont un objectif personnel commun qui les tient particulièrement à cœur : disputer la plus grande compétition planétaire tous sports confondus, en l’occurrence la Coupe du monde. Parmi eux, s’il fallait n’en choisir qu’un, ce serait Christian Vieri qui, à 32 ans, n’a plus de temps à perdre, lui qui voit la porte de la Squadra Azurra se renfermer sur lui, dans une période qui voit l’émergence des prodiges italiens sur le plan offensif. En dehors des Francesco Totti, Antonio Cassano, Alberto Gilardino et autre Luca Toni, Marco Di Vaio fait figure, lui aussi, d’outsider. Utilisé régulièrement par Francesco Guidolin, l’ancien buteur de Parme a découvert un championnat plus difficile qu’il ne l’imaginait. Au-delà de ses difficultés à retrouver le chemin des filets après sa prestation prometteuse face à Auxerre, c’est la performance générale de l’équipe qui l’empêche, à l’heure actuelle, de faire parler la poudre, au même titre que son compère de l’attaque. Constamment remanié, le dispositif mis en place par Francesco Guidolin devra trouver une certaine stabilité, pour que les automatismes se mettent enfin en place. C’est à ce prix que l’AS Monaco trouvera la solution à tous ses problèmes car c’est dans la victoire qu’un groupe puise ses valeurs et sa force collective.
Les temps sont durs à Monaco, à l’image des conditions météorologiques qui n’épargnent pas l’équipe de la Principauté, mais comme le dit le proverbe : le calme après la tempête. C’est tout le mal qu’on peut leur souhaiter !